Suite à la publication du rapport final révolutionnaire du Groupe de travail sur les défis des titulaires de permis racialisés, le Barreau de l’Ontario et de nombreux cabinets de la province ont commencé à retourner le regard de la justice vers l’intérieur, vers la diversité au sein du personnel, des associés, de l’avancement et de la direction des cabinets juridiques.
À cette fin, le Barreau exige que tout lieu de travail juridique comptant au moins 10 titulaires de permis mette en œuvre et maintienne une politique en matière de droits de la personne et de diversité. Cette politique en matière de droits de la personne et de diversité doit, au minimum, aborder l’équité en matière de recrutement, de rétention et d’avancement.
La plupart des cabinets juridiques ont encore beaucoup de chemin à parcourir pour fournir un espace sûr et inclusif pour leurs employés. Le Barreau a créé une gamme de ressources pour aider les cabinets à apporter des changements importants en matière de recrutement, de formation et d’éducation au sein des cabinets, ainsi qu’en matière d’identification et de compréhension des obstacles structurels qui peuvent aider ou entraver ces efforts.
Le Code de déontologie affirme également que les avocats ont une « responsabilité particulière » de respecter les droits de la personne et d’honorer l’obligation de ne pas discriminer. Au-delà de la discrimination directe, cela signifie également équiper les avocats pour repérer la discrimination par effet défavorable dans leurs propres cabinets, y compris les habitudes, les règles et les processus qui reproduisent involontairement la discrimination systémique. À cette fin, alors que la saison du recrutement s’intensifie, voici quatre changements d’état d’esprit pour aider l’ensemble du secteur à débusquer les obstacles à l’égalité et à l’inclusion dans les milieux juridiques.
- Être sensible au quotidien au privilège et à l’expérience vécue
Les professionnels font face à des joies et des défis similaires, comme gagner un appel ou obtenir à un excellent règlement pour votre client. Cependant, malgré les similitudes, le personnel et les avocats vivent l’industrie juridique de manière très différente. Là où un avocat est rarement victime de harcèlement par des clients, un autre peut être la cible de micro-agressions ou de harcèlement flagrant au quotidien en raison de son genre, de sa religion ou de son apparence. Des avocats exécutant exactement la même tâche peuvent avoir des expériences complètement différentes. Par exemple, un associé dont la langue maternelle n’est pas l’anglais et à qui l’on a dit qu’il « ne sonnait pas canadien » fera face à une série de pressions totalement différentes dans la préparation d’un argument oral par rapport à un avocat dont l’accent n’a jamais été remis en question. La direction des cabinets d’avocats doit prêter attention à ces différences et être prête à offrir un soutien adapté aux besoins de chacun, même si cela implique de repenser le modèle d’affaires et des pratiques de longue date.
2- Être sensible aux réseaux sociaux et professionnels invisibles
Si vous avez besoin d’embaucher rapidement ou d’orienter un client vers une ressource, appeler un vieil ami peut être la première chose qui vous vient à l’esprit. Cependant, la facilité d’accès de ces réseaux familiers peut aussi être une source d’exclusion. Créer un processus de recrutement aussi transparent que possible et offrir des opportunités aux candidats qui n’ont pas de liens préexistants avec le cabinet sont essentiels pour surmonter ces obstacles.
Comme l’a dit un jeune associé racialisé : « Je me souviens d’être allé à des dîners au cabinet où j’essayais de contribuer à la conversation et de partager mes propres expériences vécues lorsque c’était approprié, mais ne rencontrais que des regards vides et le silence. Le simple fait d’écouter davantage et de parler moins et d’être conscient de la façon dont certains sujets de conversation courants peuvent exclure les personnes qui n’ont pas grandi avec ces expériences : voilà quelque chose qui est toujours utile. »
Une autre action concrète consiste à mettre en place un programme de mentorat systématique et à planifier des activités qui encouragent l’amitié et le mentorat en dehors des réseaux sociaux préexistants.
3- Reconnaître les lacunes De nombreux cabinets d’avocats cherchent à accroître la diversité et à offrir un espace sûr et inclusif pour les employés. Dans ce processus, les cabinets doivent être capables de reconnaître et d’admettre le besoin d’amélioration lorsqu’il se fait sentir dans un domaine particulier. Par exemple, si un cabinet a réalisé une enquête axée sur la diversité et l’inclusion, il doit également partager les mesures prises pour répondre aux résultats de cette enquête. Si le partenariat ne représente pas la diversité des associés, il faut reconnaître le problème et préciser comment celui-ci sera traité à partir de maintenant.
Comme l’a expliqué un autre associé racialisé : « Alors que je passais des entrevues pour obtenir un emploi d’été, j’ai demandé à un cabinet ce qu’il faisait pour améliorer la diversité en son sein, étant donné qu’il ne semblait pas y avoir de diversité raciale ou de représentation queer. L’intervieweur a répondu en disant qu’elle ne connaissait aucune initiative au sein du cabinet visant à remédier à ce manque de diversité. La réponse a été décevante, et j’ai finalement refusé leur offre d’emploi parce qu’ils n’ont pas reconnu la nécessité d’améliorer les choses lorsque je leur ai signalé une lacune dans leur façon de faire. »
4- Sortir du moule
Enfin, la direction des cabinets d’avocats ne doit pas sous-estimer l’impact de leurs actions pour donner la permission à tout le personnel et aux associés d’exprimer leur identité. Il existe une foule de signaux intangibles que les lieux de travail peuvent envoyer pour indiquer que l’expression d’une identité de genre, d’une tradition culturelle et de la diversité, ou d’un statut familial est la bienvenue et célébrée.
Par exemple, la direction peut porter attention aux fêtes culturelles et faire de la place pour les célébrer. La direction peut également veiller à ce qu’un code vestimentaire professionnel ne nécessite pas involontairement que les avocats « blanchissent » leur apparence ou adoptent un comportement de genre spécifique. Par exemple, si une jupe droite allant aux genoux est considérée comme « professionnelle », pourquoi une abaya longue ou un kurta ne le seraient-ils pas? Partager nos propres pronoms avant une entrevue, et inviter les candidats à faire de même, est un autre moyen de faire une place aux différentes identités de genre.
Prendre le temps de réfléchir personnellement à ces enjeux est une première étape cruciale. Cependant, il est important que notre travail ne se termine pas à la réflexion personnelle. Aucun de ces changements, pris individuellement, ne sera suffisant pour créer les profonds changements structurels nécessaires pour remédier à la discrimination systémique dans l’ensemble du système juridique et garantir l’égalité pour tous.